Article de Shimon Samuels publié en anglais dans The Jerusalem Post
le 26 janvier 2021
https://www.jpost.com/diaspora/remembering-the-the-jews-of-mena-on-holocaust-remembrance-day-656797
Cet article fait suite à une réunion Zoom en anglais à laquelle participaient 184 Juifs irakiens du monde entier, à l’occasion de la commémoration annuelle des pendaisons de Bagdad, le 27 janvier 1969. Cette réunion, organisée par la communauté des Juifs irakiens de Babylone à Montréal, présentait des témoignages déchirants de témoins de ce « deuxième fahoud » (pogrom).
Voir (en anglais) https://www.youtube.com/watch?v=R0Y_Jj3QCGo&feature=youtu.be
En cette Journée internationale de commémoration des victimes de la Shoah, Yom Ha’Shoah, rappelons-nous du sort qui aurait été réservé aux Juifs de la région MENA si le général allemand Rommel avait remporté la campagne du Désert.
L’errance dans le désert : au commencement de la Nation juive (photo Haytham Shtayeh / Flash90).
Dans l’esprit des accords d’Abraham, la Shoah et son impact sur les Juifs de la région MENA (Moyen-Orient et Afrique du Nord) suscitent un intérêt croissant.
Ce 27 janvier, Journée internationale de commémoration des victimes de l’Holocauste, Yom Ha’Shoah, rappelons-nous du sort qui aurait été réservé aux Juifs de la région MENA si le général allemand Rommel avait remporté la campagne du Désert. Les appels du mufti Haj Amin al Husseini à l’extermination des Juifs par l’Allemagne nazie auraient-ils été activés dans le monde arabe, malgré la volonté de résistance à Vichy proclamée par le roi du Maroc Mohammed V et le Tunisien Moncef Bey ?
Dans la Libye occupée par les forces de l’Axe italo-allemand, les Juifs furent persécutés en vue de leur déportation. Même après la victoire alliée, en novembre 1945, un pogrom à Tripoli fit cent trente morts (dont trente-six enfants), détruisit cinq synagogues et mit à sac la plupart des maisons et des commerces subsistants.
En bref, les Juifs d’Afrique du Nord, de Syrie et du Liban, gouvernés par la France, la Palestine et l’Irak, sous mandat britannique, et même la communauté millénaire de Perse (l’Iran), jusqu’à l’invasion britannique/soviétique – tous se trouvaient en grand danger.
Le 1er juin prochain, les Nations unies marqueront le 80e anniversaire du farhoud (pogrom en arabe) perpétré en Irak. Ce pogrom fut orchestré par Rashid Ali al Gaylani, un antisémite pronazi qui s’enfuit en Allemagne après le retour des forces britanniques. Hitler l’affubla du titre de « chef du gouvernement irakien en exil ». Les pogroms de Bagdad et Bassorah firent six cents morts, des centaines de viols et de passages à tabac. Les cadavres furent jetés dans une fosse commune.
Après la création d’Israël en 1948, la plupart des Juifs de la région MENA furent expulsés ou fuirent – beaucoup en France, aux États-Unis et au Royaume-Uni, mais la majorité d’entre eux se réfugia en Israël.
En ce qui concerne la communauté juive irakienne, vieille de deux mille six cents ans, la plupart partirent en Israël pour réaliser la prophétie biblique : « Nous nous sommes assis près des fleuves de Babylone et nous y avons pleuré, nous souvenant de Sion. »
Des cent vingt mille Juifs irakiens, quelque deux mille d’entre eux demeurèrent en Irak. En 1968, ils devinrent la cible du coup d’État baasiste. La communauté fut accusée « de trahison et de collaboration avec l’ennemi sioniste ».
Le 27 janvier 1969, neuf Juifs y furent accusés d’espionnage au profit d’Israël (ainsi que trois musulmans et deux chrétiens). Ils furent pendus lors d’une exécution publique à Bagdad. Cinq cent mille Irakiens auraient fait le déplacement en autocar pour danser autour des cadavres. Trois autres Juifs furent exécutés le 26 août. Radio Bagdad diffusa : « Nous pendons des espions, mais les Juifs ont sacrifié le Christ. »
En ce temps-là, l’auteur de ces lignes faisait partie de l’Institut de politique étrangère de l’université de Pennsylvanie. Le président de l’Institut, l’ambassadeur Robert Strausz-Hupé, demanda à feu le directeur, Harvey Zuckerman, et à moi-même, de rédiger un résumé pour le secrétaire d’État de l’époque, William Rogers. En quelques heures, le papier fit la une des journaux : « Ce que l’Irak a commis est répugnant aux yeux du monde entier. »
Ce 27 janvier, l’Administration américaine ne sera sans doute pas insensible aux antécédents liés à la Shoah du nouveau secrétaire d’État, Antony Blinken.
L’auteur de ces lignes est le directeur des Relations internationales du Centre Simon Wiesenthal.