Paris, le 10 août 2022
Au début des années 1980, une série de soixante-treize attentats terroristes a été lancée contre des cibles juives et israéliennes en Europe, dont vingt-neuf en France.
Rue Copernic, 3 octobre 1980
Tout a commencé avec l’attentat de la synagogue Copernic, à Paris, le 3 octobre 1980, à la veille de Souccot. Au coin de la rue Copernic vivait la célèbre journaliste Tamar Golan. Shimon Samuels était venu lui souhaiter de bonnes fêtes.
Aliza, épouse du célèbre cinéaste Micha Shagrir, venait d’arriver d’Israël pour le week-end. Hébergée par Tamar, elle lui avait demandé si elle voulait quelque chose pour le dîner. Cette dernière lui a répondu : « Peut-être quelques figues. Descends avec Shimon et il te montrera le magasin de fruits en face de la synagogue. »
Elle et lui se sont rendus au coin de la rue, elle a tourné rue Copernic et M. Samuels a continué son chemin tout droit. Il a entendu la bombe et senti l’onde de choc qui a tué Aliza et trois autres personnes, laissant également seize blessés à l’intérieur de la synagogue.
Le lendemain matin, le Premier ministre de l’époque, Raymond Barre, a fait cette déclaration mémorable : « Cet attentat odieux qui voulait frapper les Juifs et qui a frappé des Français innocents... »
Un an plus tard, le président Giscard d’Estaing déclarait : « J’ai perdu les élections à Copernic », car il était parti à la chasse pour le week-end et avait omis de rentrer à Paris.
On a retrouvé le terroriste de Copernic à Ottawa, au Canada. Il y travaillait comme professeur de sociologie. Après de longues procédures, Hassan Diab a été extradé en 2011 vers la France pour y être jugé à Paris. En janvier 2018, il a bénéficié d’un non-lieu dont il a profité pour s’échapper au Canada – alors qu’un appel était toujours en instance contre lui.
Rue des Rosiers, 9 août 1982
Fin 2020, Shimon Samuels, devenu directeur des Relations internationales du Centre Wiesenthal, félicitait la Norvège pour l’arrestation et l’extradition de Walid Abdulrahman Abou Zayed, l’un des trois suspects de l’attentat terroriste perpétré par l’Organisation Abou-Nidal le 9 août 1982 au restaurant Goldenberg, rue des Rosiers, dans le quartier juif de Paris.
Dans une lettre adressée au ministre de français de la Justice, Éric Dupond-Moretti, M. Samuels lui rappelait que « cet attentat à la mitrailleuse, au pistolet et à la grenade est survenu à l’heure du déjeuner dans un restaurant rempli de plus de cinquante convives. Il a fait six morts et vingt-deux blessés... Les récentes tentatives d’extradition vers la France des deux autres suspects sont restées vaines : ils résident dans leur sanctuaire jordanien ».
La lettre expliquait également qu’« une incursion israélienne dans le Sud-Liban en 1982 a conduit les terroristes européens et leurs instructeurs à fuir les camps d’entraînement palestiniens et à retourner dans leur pays d’origine. Une fois chez eux, ils s’en sont pris à des banques, des hauts responsables et des ambassades, ce qui a conduit les gouvernements à sévir. En France, le programme d’alerte de sécurité Vigipirate a été instauré. Comme l’aurait formulé notre mentor, Simon Wiesenthal, ‘‘ce qui commence avec les Juifs ne finit jamais avec eux’’ ».
Par la suite, M. Samuels avait été informé qu’un « accord verbal » avait été conclu par la DST (la Direction de la surveillance du territoire) avec le groupe terroriste Abou-Nidal, accord qui offrait à ses membres « la liberté de circulation en France en contrepartie d’un moratoire pour toute violence sur le sol français ». Il y a trois ans, cet accord a été révélé dans une interview avec le chef de la DST de l’époque, Yves Bonnet.
M. Samuels soulignait qu’Abou Zayed avait échappé à la justice pendant trente-huit ans. Il évoquait le credo de Simon Wiesenthal sur les criminels de guerre : « La longévité n’est pas une excuse pour l’impunité… » Il ajoutait que « les familles des victimes et les survivants des attentats de la rue des Rosiers et de la synagogue Copernic méritent de pouvoir faire leur deuil... L’extradition d’Abou Zayed vers Paris ne doit pas se terminer comme celle d’Hassan Diab ».
Le Centre demandait instamment au ministre de la Justice de veiller à ce qu’un autre cas de « justice retardée, justice niée » ne se reproduise pas.
Copie de cette lettre a été adressée à Emmanuel Macron, président de la République française.