Paris, le 7 août 2021
Dans une lettre adressée à l’ancien rédacteur en chef de Ha’aretz, Dov Alfon, aujourd’hui directeur de la rédaction du quotidien français de centre-gauche Libération, le directeur des Relations internationales du Centre Wiesenthal, Shimon Samuels, lui faisait part de sa vive inquiétude à la lecture de l’article du 3 août appelant apparemment au « démantèlement du régime d’apartheid mis en place par Israël ».
Charles Baccouche, de l’Observatoire juif de France (OJF), a énuméré, dans Tribune juive, ce qu’il appelle « des mensonges historiques » énoncés dans cet article sur l’histoire de la « Palestine ». L’histoire de l’État juif y a été réécrite, comme si les Palestiniens étaient devenus les victimes du « colonialisme israélien et de l’apartheid ».
M. Samuels soulignait que, « comme Israël est le seul État membre de l’ONU menacé d’anéantissement, ce langage rappelle l’ambiance génocidaire de la Conférence mondiale des Nations unies contre le racisme (CMCR), conférence qui s’est tenue à Durban, en Afrique du Sud, en septembre 2001 ».
Il relatait qu’« en tant que seul membre de confession juive à avoir été élu au Comité directeur international (CDI) de Durban, j’ai assisté à cinq ‘‘PrepComs (réunions du comité préparatoire) sur trois continents’’. Mais à mon arrivée à Durban, j’ai été expulsé du CDI, hué et traité avec dérision de ‘‘Juif mondial’’. C’est dans cet environnement qu’un millier de manifestants propalestiniens ont assiégé la petite synagogue de Durban en brandissant des banderoles proclamant : ‘‘Hitler n’a pas fini son travail !’’ ».
Il poursuivait en ces termes : « Trois mois plus tard, j’ai assisté sans y être invité à la dernière réunion du CDI à l’ONU, à Genève. Sur la table était déposée une ‘‘campagne sur dix ans, programme en huit points pour le démantèlement d’Israël en tant qu’État d’apartheid’’ :
‘‘1. Une campagne de sensibilisation menée par les agences de l’ONU contre ‘l’apartheid’ israélien
2. Une campagne judiciaire auprès de la Cour pénale internationale et dans les pays de jurisprudence universelle pour arrêter les Israéliens au motif de crimes contre l’humanité
3. L’abrogation du droit au retour des Juifs en Israël
4. Son remplacement par le ‘droit au retour’ de tous les Palestiniens
5. Le rétablissement du boycott économique dormant
6. Des embargos culturels, scientifiques, sportifs, académiques, etc., désormais connus sous le nom de BDS (Boycott, désinvestissement, sanctions)
7. La rupture des relations diplomatiques, faisant d’Israël un État paria
8. Des pénalités pour les États et les ONG refusant d’obtempérer’’. »
Le Centre soutenait que « les débordements de la conférence de Durban – de la haine anti-Israël à la haine antijuive – en font le plus grand rassemblement antisémite depuis l’ère nazie. Durban II en 2009, à l’ONU à Genève, et Durban III en 2011, à l’ONU à New York, ont toutes deux été inaugurées par le président iranien de l’époque, Mahmoud Ahmadinejad, crachant sa judéophobie ».
La lettre relevait que « Libération est une publication bien trop importante pour qu’on abuse d'elle à des fins d'incitation à la haine ».
« ‘‘Démanteler le régime d’apartheid en Israël’’ ne sont pas des termes anodins, ni une question de liberté d’expression. C’est un manifeste qui peut engendrer une recrudescence de haine et de violence. Et qui pourrait même servir, involontairement, de document à l’appui de l’antisémitisme de Durban IV, qui doit se tenir à l’ONU, à New York, en septembre prochain », concluait Shimon Samuels.
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« Ma cause était la justice, non la vengeance. Mon travail est pour un lendemain meilleur et un avenir plus sûr pour nos enfants et nos petits-enfants. » (Simon Wiesenthal, 1908-2005)