Lettre ouverte aux ministres français de l’Intérieur et de la Justice
Paris, le 18 octobre 2020
Messieurs les Ministres de l’Intérieur, Gérald Darmanin, et de la Justice, Éric Dupont-Moretti,
Après le déclenchement de la seconde Intifada, en septembre 2000, et le pic de terrorisme dans le monde, le Centre Simon Wiesenthal avait parrainé une « Convention contre les attentats-suicides », rédigée par Alan Baker, alors conseiller juridique du ministère israélien des Affaires étrangères.
Cette convention pénalise les complices de la chaîne de la terreur, depuis ceux qui incitent jusqu’à ceux qui agissent, en passant par ceux qui recrutent, forment, arment, accordent refuge, financent et glorifient les auteurs de ces crimes.
Aujourd’hui, on pourrait ajouter le rôle des médias sociaux... En fin de compte, il n’y a pas de « loup solitaire » !
En 2006, trois mois après que j’ai présenté notre convention à Canberra, elle a été adoptée par le Parlement australien. L’Indonésie venait de libérer Abou Bakar Bachir, l’élément-moteur de l’attentat de Bali de 2002 qui a tué 88 Australiens, 38 Indonésiens, 23 Britanniques et des personnes de plus de 20 autres nationalités.
Elle a également été adoptée à l’unanimité par le Parlement latino-américain (Parlatino), qui regroupe plus de trente États membres, dont Cuba et le Venezuela. Ces derniers ont ajouté à la convention, respectivement « le terrorisme militaire » et « le terrorisme contre les plateformes pétrolières en mer ».
Le crime de décapitation le plus notable a été celui perpétré contre le journaliste américain Daniel Pearl. La décapitation est devenue l’emblème d’Al-Qaïda et de l’État islamique dans le Califat.
La dernière atrocité commise, la décapitation d’un professeur dans un collège de la banlieue parisienne parce qu’il avait montré à ses élèves des caricatures de Mahomet publiées dans Charlie Hebdo pour étayer un cours sur la liberté d’expression et l’intolérance, est un exemple classique de la chaîne de la terreur : le père d’un l’élève offensé qui demandait satisfaction, l’imam radical autoproclamé Abdelhakim Sefrioui qui aurait porté son jugement en ligne et réprimandé le directeur de l’établissement, le « recrutement » du tueur de 18 ans, un Tchétchène arrivé en France enfant de Moscou avec sa famille et radicalisé pour le djihad.
Tout comme de nombreuses autres affaires avant lui, le tueur n’était pas un « loup solitaire ». Bien qu’il n’ait pas été inscrit dans le fichier « S » de la Sûreté de l’État, d’autres membres de la chaîne l’étaient probablement. C’est pourquoi les organismes de sécurité doivent étendre leurs recherches.
Il est temps pour nous de renouveler notre convention, pour aider les pays victimes de la chaîne de la terreur à réagir.
Shimon Samuels, directeur des Relations internationales, Centre Simon Wiesenthal
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« Il n’y a pas de liberté sans justice. » (Simon Wiesenthal, 1908-2005)