Éditorial de Shimon Samuels publié en anglais dans The Jerusalem Post
le 11 juillet 2019
https://www.jpost.com/Opinion/UNESCO-World-Heritage-Committee-Azerbaijan-restrains-Palestinian-mayhem-595394
Vue générale du siège de l’Unesco à Paris (photo Reuters).
Alors que la session de onze jours du Comité du patrimoine mondial (CPM) réuni à Bakou arrive à son terme, il nous incombe d’examiner les questions liées au patrimoine juif, dans un contexte où l’Unesco siège en l’absence de ses membres américains et israéliens.
Bien sûr, les sempiternelles résolutions réclamées par la Jordanie et les Palestiniens dans l’article 7 sur « la Vieille Ville de Jérusalem et ses remparts » et « Hébron/Al-Khalil avec le caveau des Patriarches » sont devenues leurs bannières sur le champ de bataille du patrimoine.
Leur cause a cependant été tempérée au sein du Groupe arabe et d’un nombre élargi d’États membres arabes :
1) Les Jordaniens semblent craindre que les Saoudiens prennent en main la garde des lieux saints de Jérusalem, et les Palestiniens soupçonnent les États-Unis d’apporter leur soutien à Riyad, dans la lignée du déménagement de l’ambassade américaine à Jérusalem voulue par le président Donald Trump.
2) La fracture entre sunnites et chiites et le rôle joué par des États modérés comme la Tunisie, qui sont conscients d'une certaine fatigue face aux revendications patrimoniales des Palestiniens.
3) Le sens des responsabilités du pays hôte, l’Azerbaïdjan – un État musulman modéré, ami d’Israël, dont la communauté juive, florissante, ignore les menaces antisémites.
En 2017, au CPM qui siégeait à Cracovie, je me suis trouvé en compagnie d’un ancien maire d’Hébron. Quand je me suis levé pour m’exprimer en tant que délégué d’une ONG, on m’a tendu un bout de papier me prévenant que mon voisin aurait assassiné six étudiants d’une yeshiva venus prier dans la grotte de Machpéla. Un tel individu n’aurait jamais pu être invité à Bakou.
C’est à Cairns, en Australie, que j’ai participé pour la première fois au CPM, en l’an 2000. Je suis intervenu à propos de la discothèque que le maire d’Oswiecim avait ouverte à Auschwitz-Birkenau.
Après avoir déclaré à l’assemblée : « J’arrive de l’enfer d’Auschwitz dans ce paradis de la Grande-Barrière de corail pour vous parler de ‘‘la discothèque d’Auschwitz’’ », j’ai été arrêté dans mon élan par le président, qui s’est tourné vers le délégué polonais : « Monsieur l’Ambassadeur, ‘‘discothèque’’ et ‘‘Auschwitz’’ sont deux termes incompatibles. Fermez la discothèque ! » Quand je suis retourné en Europe, c’était chose faite. Je me suis senti fier des priorités accordées par le Comité en matière de préservation du patrimoine.
Depuis 2011, cet objectif a été éclipsé par les revendications incessantes des Palestiniens pour s’accaparer le patrimoine juif. Leur liste de souhaits officielle inclut le Mur occidental et les manuscrits de la mer Morte de Qumran.
Il est incontestable que le peuple palestinien a le droit de célébrer son propre patrimoine, mais son histoire ne peut en aucun cas se valider en usurpant l’identité du patrimoine juif, avec une feuille de route qui mène à sa déjudaïsation.
L’Unesco a promis une politique de dépolitisation en adoptant un mécanisme radical à deux poids, deux mesures : le premier, jusqu’à présent, ne s’applique qu’à Israël (désigné comme « la Puissance occupante ») ; le second concerne la Jordanie et les Palestiniens (mentionnés en tant qu’« États parties »).
1) « Consensus », c’est-à-dire ni débat ni vote, mais la simple adoption des résolutions telles qu’elles se présentent.
2) « Annexe », c’est-à-dire que toutes les charges perfides qui pèsent contre Israël sont consignées sous le titre d’« annexe », sans tenir compte du principe appliqué à tout contrat de vente ou de location considérant les « annexes » comme « partie intégrante du document ».
En tant que seule voix présente au CPM qui représente le peuple juif, le Centre Simon Wiesenthal estime que la simple existence de ces résolutions camouflées, même si elles ne sont pas contraignantes, constitue une offense pour le peuple juif du monde entier et pour le judaïsme proprement dit.
Quoi qu’il en soit, ces résolutions seront régurgitées sous diverses formes, non seulement au CPM, mais aussi aux Conseils exécutifs de l’Unesco de printemps et d’automne et, en novembre prochain, pour adoption à la session plénière de son assemblée générale.
Je suis venu à Bakou depuis Genève, où j’ai assisté à une réunion de l’ONU organisée par le Comité pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien.
Un dignitaire palestinien y a annoncé une série de mesures à prendre dans des organisations internationales et principalement dans des agences de l’ONU :
1) à la Cour internationale de justice, contre le transfert par les Etats-Unis de son ambassade à Jérusalem ;
2) au Conseil de sécurité de l’ONU, pour protester contre l’ouverture d’un tunnel sous la Cité de David ;
3) et contre le projet de la municipalité de Jérusalem d’installer un funiculaire destiné aux touristes, qui traverserait la vallée de Hinnom. On remarquera ici que le statu quo se perpétue, puisque ce funiculaire devrait remplacer un ancien modèle qui servait à alimenter les Juifs au cours du siège arabe de 1948. Ce modèle a cessé de fonctionner pendant les dix-neuf ans qui ont suivi, durant l’occupation jordanienne. On s’attendait à ce que les Palestiniens protestent contre ce nouveau funiculaire au CPM, mais ce n’aurait sans doute pas été acceptable sous une présidence azérie.
Le dernier site patrimonial inscrit par le CPM a été accordé à l’Irak pour la conservation de Babylone, qui fit jadis partie de l’histoire juive, mais qui n’est plus aujourd’hui un problème juif.
L’an prochain, quand le CPM se réunira au Fujian, en Chine, la première question que pourrait bien poser son hôte serait : « Qu’est-ce qu’un Qumran ? »
L’auteur de ces lignes est le directeur des Relations internationales du Centre Simon Wiesenthal et son observateur en chef à l’Unesco.