Blog de Shimon Samuels paru en anglais dans The Times of Israel
le 10 février 2015
sous le titre « Munich to Munich: A Symbol of Betrayal or Warning »
https://blogs.timesofisrael.com/munich-to-munich-a-symbol-of-betrayal-or-warning/
Qui dit « Munich » évoque un mot-clé de la Deuxième Guerre mondiale. Pour la mémoire collective juive, c'est un symbole de trahison :
- En septembre 1938, ce fut la courbette de Neville Chamberlain face à Hitler, brandissant son parapluie, justifiant la conciliation des Alliés comme une mesure assurant « la paix aujourd'hui ». Ce fut le prélude à la Nuit de cristal (Kristallnacht), qui surviendrait moins de deux mois plus tard. Ce pogrom national allait déclencher la Shoah. Et la trahison de Munich de 1938 devint synonyme d'éradication du petit État démocratique de Tchécoslovaquie, tandis que les partisans de la paix nourrissaient le crocodile qui allait finalement les dévorer.
- En septembre 1972, ce fut l'attentat terroriste contre l'équipe olympique israélienne, qui tua onze athlètes. Le refus obstiné du Comité international olympique de reconnaître l'horreur en respectant une minute de silence en l'honneur de ces victimes lors des Jeux suivants contribue à perpétuer un certain sens de la trahison.
- De nos jours, à la Conférence de Munich sur la sécurité, on peut voir des photos de John Kerry, secrétaire d'État américain, serrer chaleureusement la main de Mohamed Javad Zarif, ministre des Affaires étrangères iranien, avant que tous deux n'entament des discussions en tête-à-tête pour le compte des puissances occidentales du groupe P5+1 sur le programme nucléaire de Téhéran, discussions qui doivent aboutir à un « accord » avant le 31 mars prochain.
Et le régime nazi et la République islamique d'Iran, depuis leur création – respectivement en 1933 et en 1979 – tiennent les rênes d'un pouvoir fondé sur la terreur et mènent une politique basée sur l'antisémitisme et une expansion irrédentiste. Le Lebensraum (« l'espace vital ») nazi dépendait de la création de réseaux de soutien parmi les Volksdeutsche, ces Allemands de souche vivant à l'étranger. Tous deux sous l'influence d'une idéologie d'extrême-droite, partageant le même dédain pour leurs anciens gouvernements démocratiques, qu'ils considèrent comme décadents, et leur ressentiment à l'égard des Juifs. Tous deux essaimant des cellules dormantes à travers l'Europe pour créer le chaos en temps utile. Mais, par-dessus tout, l'antisémitisme a aussi créé une plate-forme de solidarité au sein des groupes nationalistes « non aryens » et dans les pays occidentaux qui percevaient le national-socialisme comme un bouclier contre une plus grande menace : le communisme soviétique.
L'antisémitisme a fourni des auxiliaires nazis même parmi les Slaves, qu'Hitler avait marqués sur sa liste de peuples à anéantir. La politique occidentale de conciliation s'est poursuivie malgré quelque deux décennies d'avertissements clairs : les déclarations de guerre du parti national-socialiste naissant contre les Juifs, le programme de réarmement massif du régime nazi, un terrorisme d'État à l'intérieur et à l'extérieur de l'Allemagne, des menaces proférées contre les pays qui manifestaient leur soutien à leurs minorités allemandes, des provocations continues pour tester la frilosité occidentale. C'étaient des signes qui auraient dû faire office de système d'alerte précoce au lendemain de la Première Guerre mondiale. Aujourd'hui, il est indéniable qu'ils doivent servir de baromètre. La révolution de l'ayatollah Khomeini, en 1979, a instauré la République islamique, dont la politique a pour fondement l'antisémitisme et une ambition de « califat » pour justifier ultimement le chiisme dans le monde islamique.
Aujourd'hui, les attaques contre les Juifs et contre l’État juif recueillent même le soutien des sunnites, bien qu'ils soient les prochains sur la liste de Téhéran des populations à anéantir.
L'Iran a essaimé des cellules chiites, à l'aide de son allié militaire le Hezbollah, à travers le Moyen-Orient, l'Europe, l'Afrique et l'Amérique latine. Ces cellules ont perpétré des attentats antisémites de Buenos Aires à la Bulgarie. Il existe une installation de missiles sous contrôle iranien sur la côte caraïbe du Venezuela, d'une portée qui peut atteindre Tampa, en Floride.
Des mosquées chiites apparaissent en Europe de l'Ouest, qui rivalisent avec les financements saoudiens sunnites dans les Balkans. L'Iran leur fait concurrence pour obtenir des soutiens politiques auprès de groupes de gauche et pour recruter de jeunes djihadistes de la diaspora musulmane, qu'elle soit chiite ou sunnite, toujours sur la base d'une hostilité commune envers les Juifs, Israël et l'Occident.
Pendant ce temps, un Occident qui se veut conciliant considère l'Iran comme un bouclier contre une plus grande menace, l'organisation État islamique en Syrie et en Irak. Les Occidentaux se préparent même à accepter un Iran doté de l'arme atomique, mettant des œillères face à l'éventualité d'une implantation d'armement nucléaire et de sa prolifération dans la région.
Malgré tous ces signes avant-coureurs, on n'a jamais cru Hitler capable de sacrifier tout son peuple – « la race des maîtres » – et d'en engloutir des millions dans une guerre totale.
Tous les signaux d'alerte se dirigent maintenant vers l'arrogance des ayatollahs de Téhéran. Au nom de leur dieu, ils ont banni la démocratie et les droits fondamentaux dans leur propre pays ; ce sont les bailleurs de fonds du terrorisme international. Depuis 1979, ils élèvent une génération de tueurs à gages « gardiens de la révolution » et, avec l'appui du Hezbollah, ils assument la responsabilité de plus de 200 000 victimes civiles en Syrie.
Pourquoi auraient-il le moindre scrupule à employer l'option nucléaire pour mettre leurs menaces clairement exprimées à exécution, effaçant Israël de la carte puis attaquant le Golfe sunnite et l'Occident lui-même ?
M. Kerry, changez le symbole de Munich – faites-en un avertissement, et non un précédent.