Ce concours interuniversitaire, lancé en 2004 dans tous les pays de l’ex-Union soviétique, est passé de 25 candidats à sa création à plus de 2 000 participants cette année.
Paris, le 8 juillet 2013
Fondé par le Centre russe d’études sur l’Holocauste, basé à Moscou, et la filiale française pour l’éducation du Centre Simon-Wiesenthal, l’association Verbe et Lumière – Vigilance, ce concours s’achève traditionnellement au siège parisien de l’Unesco, où les cinq lauréats annuels reçoivent leur récompense.
La cérémonie a été ouverte par Shimon Samuels, Alla Gerber et Ilya Altman, respectivement directeur des Relations internationales du Centre Wiesenthal et coprésidents du Centre russe d’études sur l’Holocauste. Alla Gerber est en outre la première femme à siéger au parlement de la Russie postsoviétique. Y ont assisté les délégués permanents auprès de l’Unesco de l’Allemagne, des Etats-Unis, de la France, de la Hongrie, d’Israël, de la Russie, de l’Ukraine et du Vatican.
La réunion était présidée par Getachew Engida, directeur général adjoint de l’Unesco. Celui-ci a déclaré que l’Holocauste représentait « un sombre héritage pour l’humanité ». Il a chaleureusement remercié les étudiants primés pour leur implication dans cette étude.
Alla Gerber a enchaîné en lançant l’alerte sur une montée de la xénophobie en Russie : « C’étaient des slogans tels que "La Russie aux Russes" qui ont conduit au génocide. »
Cette année, les principaux intervenants étaient David Kessler, conseiller culturel du Palais de l’Elysée, et le père Norbert Hofmann, secrétaire de la Commission du Vatican pour les relations religieuses avec le judaïsme.
M. Kessler a centré son discours sur « le paradoxe historique d’une France tout à la fois collaboratrice et résistante ». Il a mis l’accent sur le rôle des compensations, de l’ouverture des archives et de l’éducation dans la compréhension de cet aspect de l’Histoire. Il a mentionné son propre travail dans le processus de restitution et cité l’ouvrage de Jacques Sémelin,Purifier et détruire. Usages politiques des massacres et génocides.
Le père Hofmann a parlé de l’Holocauste en tant qu’« un instrument du néo-paganisme pour effacer de l’Histoire la force divine ». Il a évoqué la déclaration Nostra Aetate comme étant « la Grande Charte des relations de l’Eglise catholique avec le judaïsme ». Il a également fait référence à la collaboration et à la résistance des Catholiques, ainsi qu’à « la majorité silencieuse qui a gardé les yeux fermés ». Il a en outre exposé en détail « l’engagement actuel de l’Eglise catholique qui la lie étroitement au peuple juif ».
Voici les cinq lauréats et les travaux pour lesquels ils ont été primés :
- Mme Nadiia Skokova, de l’Université nationale d’Ostroh (Ukraine), pour « L’Holocauste en Volhynie durant l’occupation nazie ».
- M. Nikita Vrazovskiy, de l’Université d’Etat des sciences humaines de Russie (Moscou), pour « L’insurrection des ghettos de Varsovie et de Bialystok ».
- Mme Svetlana Antonova, de l’Université d’Etat de Moscou, pour « L’Holocauste dans la presse israélienne – une étude comparée des discours dans les médias hébreux et russes ».
- Mme Vera Beletskaya, de l’Institut d’Etat moscovite des relations extérieures, pour « L’Holocauste et le complexe de culpabilité des Allemands ».
- M. Gukov Arsenii, du complexe Education-Science-Production de l’université d’Orel, pour « Une analyse comparative des négationnismes ».
Parmi les interventions des diplomates, signalons :
- Katalin Bogyay, ambassadrice de Hongrie et présidente de la Conférence générale de l’Unesco, dont le discours a porté sur les projets en cours pour commémorer en 2014 le 70e anniversaire de la déportation des Juifs hongrois. En tant qu’ancienne journaliste, elle a aussi exprimé les « difficultés à engager les jeunes générations dans ce dialogue et le défi que constitue l’élaboration de nouvelles méthodes de formation des enseignants ».
- Michael Worbs, ambassadeur d’Allemagne, a complimenté le Centre russe d’études sur l’Holocauste pour « son initiative, après l’ère soviétique, de réconcilier le peuple avec son passé, et non pas de le refouler ».
- Monseigneur Follo, ambassadeur du Vatican, a émis l’opinion que « ne faire qu’étudier les événements de l’Holocauste n’est pas suffisant : il s’agit aussi d’en tirer les conséquences. On peut bien connaître le commandement "Tu ne voleras point", encore faut-il le respecter ! »
- David Killion, ambassadeur des Etats-Unis, a félicité « le Centre Simon-Wiesenthal pour avoir incité l’Unesco à être ce qu’il avait pour mission d’être ». Et il a ajouté : « Nous portons tous la culpabilité collective de l’esclavage et celle de ne pas être intervenus suffisamment tôt pour arrêter l’Holocauste et le génocide au Rwanda. »
Richard Odier, président de Verbe et Lumière – Vigilance, a conclu la réunion en soulignant que l’Holocauste devait aujourd’hui servir d’appel pour intervenir systématiquement dans les cas de massacres collectifs, comme ceux commis au Darfour, en Syrie ou dans toute région du globe non couverte par les médias.
Les docteurs Altman et Samuels ont révélé que, « durant ces neuf dernières années, des milliers d’étudiants de Russie, de Biélorussie, d’Ukraine et des Pays baltes ont, grâce à ce programme, été sensibilisés à l’histoire de l’Holocauste, en particulier celui perpétré sur le territoire de l’Union soviétique ». Avec quarante-cinq essais primés et des milliers de dépôts de candidature envoyés d’Arkhangelsk à Vladivostok, ils ont proposé que, « pour ce dixième anniversaire, cette mine de documents soit réunie en publication sous les auspices de l’Unesco ».
Rangée du haut, de gauche à droite : les lauréats, les délégués russe et américain, Ilya Altman,
Graciela Samuels (Unesco), le frère Norbert Hofmann, Paola Leoncini-Bartoli (Unesco), Shimon Samuels.
Rangée du bas, de gauche à droite : le délégué français, David Kessler, l’ambassadeur de Hongrie,
Getachew Engida, directeur général adjoint de l’Unesco, Alla Gerber, le délégué du Vatican.