Le département d’État doit agir contre les diffamations antisémites
par Shimon Samuels et Alex Uberti

Paris, le 2 avril 2025

Monsieur le Secrétaire d’État,

La page Facebook de l’école secondaire pour garçons Zaid-Bin-Harithah de Madaba, en Jordanie, a publié une vidéo de Jamal Shehadeh, élève de seconde sélectionné pour participer à l’édition 2025 d’un concours de lecture en arabe. Il s’agit de l’une des initiatives internationales lancées par l’émir de Dubaï, le cheikh Mohammed ben Rashid Al Maktoum, pour encourager les enfants à lire.

Dans le clip, cet élève fait l’éloge du « plus beau livre » qu’il ait jamais lu. Il s’intitule Le quartier juif (du sang pour le pain azyme de Sion), son auteur en est Najib Al-Kilani. Cela nous horrifie.

Le livre est également distribué en ligne par Noor Books.

L’écolier mentionne que le thème principal du livre est « le meurtre du père Thomas par les Juifs, afin d’obtenir du sang chrétien pour leurs pains sans levain (le pain azyme) de la Pâque... comme mentionné dans leurs livres et dans le Talmud, qui est pour eux source de merveilles et de miracles ». Et d’ajouter : « Les cent pages de ce livre sont passionnantes. »

Selon la page Facebook de l’école, le concours de lecture bénéficie du programme SKEP (Schools for a Knowledge Economy Project) de l’USAid (l’Agence des États-Unis pour le développement international).

Pour votre information, Najib Al-Kilani (1931-1995) était également, entre autres, un fervent adepte des Frères musulmans, l’organisation suprémaciste panarabe qui a inspiré plusieurs organisations terroristes, telles que le Hamas, le Jihad islamique palestinien, al-Qaïda ou l’État islamique.

La même fausse conspiration – également connue sous le nom de « l’affaire de Damas » – a été plagiée dans L’Azyme de Sion, un roman de 1983 de l’infâme ancien ministre syrien de la Défense (sous le dictateur Hafez el-Assad), Mustafa Tlass. C’était un tortionnaire et un meurtrier brutal, ainsi qu’un antisémite notoire.
Voir (en anglais) : https://www.memri.org/reports/mustafa-tlass-blood-libel-matzah-of-zion

Au début des années 1990, un producteur égyptien, Munir Radhi, a décidé d’adapter ce livre odieux en film, « en réponse à ‘‘La Liste de Schindler’’ » (sic !). Après un premier article paru en 2001, résumant le contenu de l’ouvrage, le journal égyptien Al-Ahram et d’autres médias arabes ont régulièrement relayé cette diffamation pour attiser la haine des Juifs au Caire, à Damas, à Beyrouth, à Ramallah, à Alger ou à Bagdad...

Dans ses nombreuses versions, cette histoire figure parmi les principales accusations de meurtre rituel et théories du complot qui apparaissent régulièrement dans les six salons du livre arabes que nous surveillons depuis ces vingt dernières années. Elle est devenue un best-seller dans toute la région MENA – à côté du faux russe Les Protocoles des Sages de Sion, du Juif international d’Henry Ford et de Mein Kampf d’Hitler. Ces livres ont pour but d’inciter à la haine des Juifs et de justifier violence et soif de génocide auprès d’individus et de groupes terroristes.

Monsieur le Secrétaire d’État, puisque l’USAid, démantelée par l’administration Trump, ne peut plus influencer ni contrôler les écoles qu’elle a soutenues, nous vous prions instamment de transmettre notre lettre aux ambassades des États-Unis et aux autres missions diplomatiques, particulièrement dans le monde arabe. C’est un message d’alerte pour contrer l’omniprésence de la propagande antisémite, publiée en tant que littérature ou diffusée dans les réseaux sociaux. Cette propagande sert l’objectif des organisations terroristes – recruter, endoctriner et inciter les prochains meurtriers qui sont parmi nous !

Dans le contexte actuel où le monde est de plus en plus à la recherche de boucs émissaires juifs, votre action est éminemment urgente. À l’approche de la prochaine fête de Pessah, cette accusation de meurtre rituel ne doit pas devenir, comme par le passé, un déclencheur d’assassinats.

C’est par la connaissance que l’on peut combattre la haine et promouvoir la tolérance et le dialogue.

Nous vous prions d’agréer, Monsieur le Secrétaire d’État, l’expression de notre haute considération.

Shimon Samuels et Alex Uberti

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Shimon Samuels est directeur émérite des Relations internationales du Centre Simon Wiesenthal
Alex Uberti est chercheur et consultant indépendant

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Pour plus d’informations, contactez stsamuels018@gmail.com