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Paris, le 7 août 2022

À l’attention de M. Josep Borrell Fontelles
Haut Représentant de l’Union européenne
pour les affaires étrangères et la politique de sécurité

Monsieur le Haut Représentant,

Il ne fait guère de doute que l’Iran soutient le Djihad islamique palestinien (DIP), qui déferle cette semaine une pluie de roquettes contre Israël. Il est de notoriété publique que le DIP opère sous mandat de Téhéran à Gaza et en Cisjordanie, comme le Hezbollah opère pour l’Iran depuis le Liban. L’objectif de ces organisations terroristes est le même : l’anéantissement d’Israël et des Juifs.

Le secrétaire général du DIP, Ziad Nakhalé, cherche actuellement un soutien opérationnel et financier auprès de ceux qui tirent les ficelles : le Corps des gardiens de la révolution iranienne (CGRI) – l’élite des forces armées de Téhéran, considérée comme une organisation terroriste par les États-Unis. Le DIP a reçu cette année quelque 70 millions de dollars de Téhéran, et on lui en a promis plus si les sanctions sont levées.

Le remplaçant du cerveau d’Al-Qaïda, Ayman al-Zawahiri, qui a été « exécuté » cette semaine, est Saif al-Adel. Ce dernier est impliqué dans de nombreux enlèvements, assassinats et attentats terroristes, de Daniel Pearl au 11-Septembre. Il a passé des années à Téhéran et il s’y trouve actuellement sous une forme d’assignation à résidence qui convient aux deux parties. L’Iran peut ainsi dicter les cibles prioritaires d’Al-Qaïda.

Malgré les sanctions, la dynamique industrie iranienne de l’armement fournit actuellement des drones à la Russie, y compris des drones suicides (ou « munitions rôdeuses »), qui seront utilisés pour tuer à la fois des Ukrainiens et des volontaires étrangers.

Des engins d’attaque rapide du CGRI partent de la base navale de Qeshm. Ils visent pétroliers et cargos qui circulent dans la voie de navigation stratégiquement cruciale du détroit d’Ormuz, perpétrant ce que l’on appelle « le terrorisme énergétique » et la piraterie.

Téhéran est directement impliqué dans l’attentat de Buenos Aires de 1992 contre l’ambassade d’Israël (29 morts et 242 blessés) et dans celui de 1994 contre le centre juif Amia (85 morts et plus de 300 blessés). Des « notices rouges », mandats d’arrêt d’Interpol, ont été lancées contre cinq Iraniens qui se trouvent maintenant à la tête de la hiérarchie du régime.

Le réseau de cellules dormantes des Forces Al-Quds (les forces du renseignement étranger du CGRI), ainsi que des agents du Hezbollah contrôlés par l’Iran, envahissent les pays d’Amérique latine, du Venezuela à l’Argentine. Nombre d’autres États de l’hémisphère occidentale sont eux aussi infiltrés par des cellules dormantes.

Le régime iranien détient des citoyens européens en otage, faussement accusés d’espionnage et retenus sans procédures régulières. De la monnaie d’échange contre la levée des sanctions ?

L’Iran pratique des condamnations à mort massives, horribles et démonstratives –pendaisons publiques, pelotons d’exécution ou lapidations –, même à l’encontre de mineurs et de femmes enceintes. Parmi les « crimes capitaux » les plus courants figurent l’homosexualité, l’apostasie et la dissidence politique...

L’Iran avait transformé en prison une ancienne école de l’Unesco à Dezfoul, ville que le régime avait souhaité inscrire au Patrimoine mondial. « La prison de l’Unesco » serait utilisée pour détenir, torturer et exécuter des mineurs.

Pour Reporters sans frontières (RSF), le classement iranien de la liberté de la presse a chuté à la 178e place sur 180 pays étudiés. Le régime pseudo-théocratique arrête régulièrement des journalistes.

L’actuel président iranien, Ebrahim Raïssi, est surnommé « le boucher de Téhéran » pour sa réputation, sur trois décennies, en tant que procureur général et chef du système judiciaire...

En juin dernier, en signe d’hostilité envers l’AIEA (l’Agence internationale de l’énergie atomique), l’organisme onusien de surveillance contre la prolifération nucléaire, l’Iran a désactivé ses caméras de surveillance destinées à garantir sa bonne foi dans sa limitation du processus d’enrichissement de l’uranium et sa renonciation à la « militarisation » de l’énergie nucléaire.

En juillet, un conseiller supérieur du guide suprême, l’ayatollah Ali Khamenei, a déclaré que l’Iran était désormais « capable de fabriquer sa première bombe atomique, mais qu’il devait encore décider s’il allait le faire ». S’agit-il d’intimidation ou de chantage ?

Monsieur le Haut Représentant, l’Union européenne tente-t-elle toujours de convaincre les États-Unis de relancer l’accord de Vienne sur le nucléaire iranien ? Cette relance rapporterait des milliards de dollars à l’Iran. Dont de nombreux billets verts serviraient très vite à financer le réseau génocidaire du régime, qu’il s’agisse du programme nucléaire et de missiles balistiques, du soutien à ses mandataires du DIP, du Hamas et du Hezbollah, ou de la projection à l’international du CGRI.

Selon plusieurs sources d’experts indépendants (CSIS, IISS Military Balance ou IHS Jane’s), l’Iran possède l’arsenal de missiles balistiques le plus important et le plus diversifié du Moyen-Orient (dont des missiles de croisière). Un arsenal capable à ce jour d’atteindre Israël et la Méditerranée orientale. L’accord de Vienne sur le nucléaire iranien ne couvre pas les missiles balistiques.

Monsieur le Haut Représentant, cette situation nous rappelle la déclaration de Neville Chamberlain de 1938 à la suite de sa discussion avec Adolf Hitler : « ... Je reviens d’Allemagne et j’apporte la paix avec honneur. Je crois sincèrement que c’est la paix pour notre temps... Rentrez chez vous et dormez sur vos deux oreilles. »

Monsieur le Haut Représentant, dans cette perspective, l’accord de Vienne n’est-il pas un autre pari aveugle sur « la paix pour notre temps », ou le prix à payer pour plus de gaz et de pétrole bon marché ? Dans les deux cas, cela ressemble bien à un accord perdant-perdant.

Nous prions instamment l’Europe de revenir à la raison et de rester vigilante. L’Iran n’est autre qu’un régime nazi moderne. Elle menace – à l’intérieur comme à l’étranger – tous ceux qui ne se conformeraient pas à ses diktats intransigeants. Sa menace explicite plane sans discernement sur l’Europe et sur l’Occident.

Notre avertissement, « J’accuse », surviendrait trop tard.

Nous vous prions d’agréer, Monsieur le Haut Représentant, l’expression de notre considération la plus distinguée.

Dr Shimon Samuels
Directeur des Relations internationales
Centre Simon Wiesenthal