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« Ce que nos adhérents estiment être une attaque contre l’un des principes fondamentaux du judaïsme sera interprété comme une agression contre le peuple juif. »

Paris, le 3 mai 2020

Dans une lettre adressée à Me Steven Svoboda, directeur exécutif de Attorneys for the Rights of the Child (ARC, une association internationale d’avocats pour la protection des droits de l’enfant), le directeur des Relations internationales du Centre Wiesenthal, Shimon Samuels, protestait contre leur campagne visant à interdire la brith mila, le rite juif de la circoncision. Il demandait instamment à M. Svodoba des explications sur les références indiquées ci-dessous.

- En 2019, l’ARC aurait été l’instigateur d’une somme d’articles intitulée « The Brussels Collaboration on Bodily Integrity », publiée dans The American Journal of Bioethics. Ces écrits répondent à un autre article de cette même revue, « Female Genital Cutting (FGC) », soit l’excision, qui y est comparée à la brith mila, le rituel juif de la circoncision. Ceci « ne s’applique pas seulement aux fillettes mineures, mais plutôt aux mineurs non consentants de tous âges, quel que soit leur sexe ou leur genre… Couper les parties génitales d’une personne sans son consentement représente une sérieuse violation de son droit à l’intégrité de son corps. Comme telle, cette pratique n’est moralement pas défendable… » (note 1)

- Ces articles écrits hors contexte dénotent une piètre compréhension du rôle de la circoncision, pratiquée – depuis Abraham, Jésus et jusqu’à ce jour – au huitième jour de vie des nouveau-nés mâles juifs. Il s’agit de la deuxième étape de la vie, après la naissance et avant la bar mitzvah à 13 ans suivie, éventuellement, par le mariage. L’article susmentionné prétend que « nombreux sont ceux qui reviennent sur les traditions culturelles ou les croyances religieuses avec lesquelles ils ont grandi, et ils les rejettent ». (note 2)

- Un autre article présente une contradiction qui laisse perplexe : « Dans le judaïsme, seuls les garçons ont le droit de sceller leur alliance avec Dieu, ce qui est de prime abord sexiste. » (note 3)

- Dans son propre ouvrage, A Rose by Any Other Name, Svodoba suggère qu’« aux États-Unis, il existe chez les Juifs laïcs et réformés une tendance, hésitante mais visible, à questionner la nécessité d’un tel rite ». (note 4)

M. Samuels remarquait que « ceci peut être interprété comme une incitation à diviser le judaïsme ».

- Plus inquiétant, le passage suivant relate que « le docteur Abraham Wolbarst a eu le génie de percevoir que le moyen le plus sûr de préserver la circoncision mâle en tant que rite religieux au sein de la communauté juive était de la généraliser dans la société tout entière, au nom d’une mesure de précaution sanitaire nécessaire ». (note 5)

Le Centre estimait qu’une telle déclaration, sans nécessairement vouloir être nuisible, laissait cependant la porte ouverte aux complotistes.

La lettre soulignait comment, « dans l’Allemagne nazie des années 1930, les Juifs continuaient à pratiquer la brith mila en tant qu’acte de résilience et de résistance. En 2012, un tribunal de Cologne tenta de l’interdire. La communauté juive allemande, secondée par le Centre Simon Wiesenthal, s’indigna auprès des instances berlinoises qu’une telle loi puisse voir le jour en Allemagne, 67 ans après l’Holocauste. La décision fut ainsi annulée et une nouvelle loi instaurée pour protéger le droit à la liberté religieuse ».

Maintenant, l’ARC semble faire de cette question un enjeu politique. Dans un premier temps, elle l’a soumise au Conseil des droits de l’homme des Nations unies, à Genève, puis, en 2019, dans le Brussels Collaboration on Bodily Integrity  leur plateforme qui porte le nom du siège de l’Union européenne –, avec l’intitulé : « Medically Unnecessary Genital Cutting and the Rights of the Child – MOVING TOWARDS CONSENSUS » (« Mutilations génitales sans raison médicale et droits de l’enfant – SUR LA VOIE D’UN CONSENSUS »).

En fait, l’article de Claudia Merli a tous les airs d’un programme politique :
- « Déclarations éthiques claires d’instances médicales professionnelles ;
- campagne sociale orientée vers l’éducation et la prise de conscience ;
- soutien moral et matériel aux dissidents des communautés qui pratiquent [la circoncision]. »

- La déclaration suivante soulève d’autres questions : « La circoncision mâle n’est jamais ‘‘une simple petite coupe’’. C’est souvent une intervention traumatisante ; elle est généralement très douloureuse, même dans un cadre hospitalier… J’invite ceux qui lisent ce commentaire à regarder cette vidéo, qui montre une circoncision juive. » (note 6)

« M. Svodoba, ce que nos adhérents estiment être une attaque contre l’un des principes fondamentaux du judaïsme peut être interprété comme une agression contre le peuple juif », concluait Shimon Samuels.

NOTES:

1) Medically Unnecessary Genital Cutting and the Rights of the Child, par Claudia Merli, 2019, page 2

2) ibid., C. Merli, page 7

3) Female Genital Mutilation [FGM] and Male Circumcision: Should there be a Separate Ethical Discourse?, par Brian D. Earp, Oxford, 2014, page 2

4) A Rose by Any Other Name: Rethinking the similarities and differences between male and female genital cutting, par Steven Svoboda et Robert Darby, Basic Books, 2000

5) ibid., S. Svoboda, page 285

6) ibid., B. D. Earp, Oxford, 2014, page 11