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Le Centre Wiesenthal demande des précisions : les recommandations du Conseil européen sur les Relations étrangères (ECFR) sont-elles représentatives de la politique européenne ?

Paris, le 28 novembre 2016

Dans une lettre adressée au président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, le directeur des Relations internationales du Centre Simon Wiesenthal, Shimon Samuels, lui demandait, en tant que représentant le plus haut placé de l’Union européenne, de « clarifier la relation entre les instances de l’UE et le Conseil européen sur les Relations étrangères (ECFR) ».

M. Samuels remarquait que « ce groupe de réflexion doté de moyens importants – avec des bureaux à Berlin, Bruxelles, Londres, Madrid, Paris, Rome, Sofia et Varsovie – présente ce qui semble être un nouvel élément de cynisme dans l’arsenal contre l’État d’Israël : la ‘‘différenciation’’ ».

Il poursuivait en ces termes : « Pour les profanes, la ‘‘différenciation’’ est un jargon qui distingue le traitement des Juifs résidant à l’intérieur des lignes de cessez-le-feu de 1948-1967 et celui des Juifs qui résident au-delà de ces lignes. »

La lettre rappelait que « ces lignes in situ marquaient la fin de la guerre d’agression de 1948, qui avait eu pour conséquence l’occupation jordanienne et égyptienne des terres attribuées par l’ONU à un État palestinien. Une autre guerre d’agression arabe, en 1967, avait eu pour conséquence leur remplacement par une administration israélienne et le retour des Juifs sur les terres desquelles ils avaient été violemment expulsés en 1948, et particulièrement la Vieille Ville de Jérusalem et sa périphérie ».

M. Samuels soulignait qu’« à aucun moment les lignes de cessez-le-feu n’ont été reconnues internationalement en tant que frontières. Malgré l’acceptation juive de la partition, la ‘‘Palestine’’ fut avortée par le rejet arabe d’une souveraineté juive, que ce soit à l’intérieur des lignes de cessez-le-feu ou au-delà. Même aujourd’hui, l’usurpation palestinienne du patrimoine juif, par exemple, par le biais de l’Unesco, et leur refus de reconnaître toute souveraineté juive, ne cessent d’anéantir tout espoir de solution à deux États ».

« L’ECFR ajoute à cette mixture un faux-semblant d’équité – la ‘‘différenciation’’ – qui aura sans doute pour conséquence une campagne proto-BDS pour porter davantage atteinte à l’État juif et pour le délégitimer », observait le Centre.

La lettre attirait l’attention sur un paragraphe inquiétant pour les défenseurs d’Israël : « Proposer moins d’encouragements et plus d’obstacles dans ces transactions avec Israël serait probablement la formule ‘‘la plus efficace’’. »

Les formulations suivantes s’avéraient particulièrement inquiétantes :

- « Recommandations stratégiques : résister au développement des colonies israéliennes » [Cette phraséologie contribue à diaboliser l’État juif.]

- « En juillet 2016, l’inquiétude quant à la possible étendue de la différenciation dans la sphère des relations financières entre l’UE et Israël a conduit à la baisse des indices bancaires de Tel-Aviv de 2,46 points. » [Ne s’agit-il pas de BDS ?]

« Alors que le mouvement BDS cherche à isoler Israël sur les plans diplomatique, économique et culturel, la différenciation ne cible que les colonies et leurs racines, et non pas l’État d’Israël à l’intérieur de ses frontières internationalement reconnues. » [Il serait intéressant de décrypter la référence à « leurs racines » et la confirmation intrigante par l’ECFR de ce que sont les lignes de cessez-le-feu dites « frontières internationalement reconnues » !]

- « … un résultat peu concluant des efforts actuels de la France pour relancer les négociations risque... » [Des efforts, soit dit en passant, qui furent initiés alors que Paris avait annoncé l’exclusion d’Israël – une décision qui en rappelle vivement une autre : l’accord de Munich, en 1938, qui sacrifiait la Tchécoslovaquie.]

Les recommandations du rapport comprennent :

- « Répliquer aux allégations israéliennes d’antisémitisme, … ne pas les repousser… signifierait que les Européens pensent que les politiciens israéliens ont raison de parler d’anti-judéité, d’étoiles jaunes et des jours les plus sombres de l’histoire européenne en référence à l’action de l’UE. » [Ceci est, en fait, l’opinion de nos membres.]

- « Israël milite contre la différenciation de l’UE à Washington, D.C., en particulier par le biais du Congrès américain... » [Un complot ?]

- « Les commentaires du président Barack Obama à Jérusalem en mars 2013 : ‘‘étant donné la frustration de la communauté internationale à propos du conflit, Israël doit inverser un contre-courant d’isolement’’ pourraient aussi être interprétés comme un clin d’œil à l’Europe et à d’autres acteurs qui ne sont pas paralysés par la politique américaine pour qu’ils proposent d’autres mesures de dissuasion. » [Un complot ?]

M. Samuels suggérait que, « quand des bandes de hooligans BDS en uniforme attaquent des supermarchés français, qu’ils remplissent leurs caddies de produits casher ou israéliens, qu’ils se ruent devant des clients terrifiés pour brûler leur butin au-dehors, on peut pardonner aux Juifs français d’avoir en mémoire l’ordre donné sous l’Allemagne nazie : ‘‘Kauft Nicht bei Juden !’’ (‘‘N’achetez pas chez les Juifs !) ».

Le Centre estimait que « le langage formulé dans le rapport de l’ECFR est profondément choquant dans ses nuances et ses euphémismes. Il encourage les semeurs de haine à se jeter sur leur proie, qu’elle se trouve dans l’État juif ou dans la diaspora ».

« Nous vous prions instamment, Monsieur le Président, de condamner ce contenu et de nous faire savoir si la ‘‘différenciation’’ – telle que présentée par l’ECFR – est la politique de l’Union européenne », concluait M. Samuels.